par Jacques Myard | [débat] |
D'AUCUNS voudraient assimiler l'affaire des immigrés clandestins de l'église Saint-Bernard à une nouvelle affaire Dreyfus ; d'autres, sans doute enclins à la même modération, parlent de la renaissance de Vichy ! Excusez du peu ! On croît rêver. Cette affaire illustrerait, selon-eux, l'exemple idéal du déshérité opprimé par le pouvoir, sacrifié sur l'autel de la raison d'Etat. En un mot, la France serait sourde à la souffrance du monde, frappée d'autisme, elle serait devenue une « forteresse vide » et sans âme. Rarement sans doute problème politique aura été exploité avec une telle coupable inconscience et une telle irresponsabilité par des têtes vides. Rarement problème politique aura ainsi été dévoyé par des manipulateurs partisans, pratiquant avec délice l'amalgame et relayés par des médias en mal de sensationnel dans la désolation du mois d'août !
En l'occurrence, il ne s'agit pas d'une simple polémique politicienne, mais bien d'une forfaiture de l'histoire. Or, l'histoire n'aime pas les forfaitures car elle a un sens, et elle se venge par un implacable avenir.
L'avenir sera écrit non par des intellectuels au jugement décalé par rapport à la situation, mais par la réalité. En matière d'immigration, cette réalité est triple.
Première réalité : il n'y a pas de société sans loi. Gouverner, c'est d'abord appliquer les lois. Les anciens connaissaient la valeur de ce principe, eux qui n'hésitaient pas à enseigner à leurs enfants qu'il faut défendre ses lois plus fort que ses murailles.
Par quelles confusion mentale quelques bons esprits peuvent-ils outrageusement professer que le premier scandale est l'application de la loi ? Il est vrai que l'ancien locataire de l'Elysée avait eu l'impudence de déclarer qu'il ne fallait pas appliquer la force injuste de la loi (sic). De ce jour, la République a vacillé sur ses bases.
Elle est heureusement aujourd'hui en voie de retrouver ses fondements légitimes : le gouvernement est décidé à appliquer les lois qui ont été voulues et votées par les représentants du peuple. La loi doit rester, comme le rappelait le juriste Carré de Malberg, la plus haute expression de la souveraineté du peuple.
C'est à l'Etat de définir et de mettre en oeuvre la politique d'immigration, non aux groupes de pression. N'oublions pas non plus que toute politique, pour être crédible, doit être cohérente et compréhensible.
En conséquence, tout étranger en situation irrégulière sera renvoyé chez lui. Depuis quand, au demeurant, renvoyer des personnes dans leur pays sous réserve des cas d'asile serait contraire aux droits de l'homme ? Toute dérive par rapport à ce principe d'airain l'application des lois est la porte ouverte à l'arbitraire.
Deuxième réalité : la situation de nos banlieues. Cela a été dit et redit : la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde [mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part...]. À l'évidence, l'accoutumance à la vérité semble l'estomper. Mais comment peut-on oublier la situation très tendue qui règne dans certaines banlieues, véritables zones de non-droit, qualifiées de « cités interdites » par un récent rapport des commissaires de police ?
Il est évident que tout apport incontrôlé d'une immigration supplémentaire provoquera une montée peut-être irrationnelle mais bien réelle de la xénophobie et du racisme. En outre, comment peut-on ignorer la radicalisation islamiste qui professe une lecture du Coran parfaitement incompatible avec les lois françaises ?
Troisième réalité : la situation internationale. L'Afrique avait, en 1950, 250 millions d'habitants, elle en comptera 850 en l'an 2000 et 1,65 milliard en 2035. Jamais l'humanité n'aura connu un tel déséquilibre entre un Nord vieillissant et un Sud croulant sous le poids de la jeunesse.
La politique de fermeté en matière d'immigration sera l'un des éléments avec d'autres bien évidemment, parmi lesquels le développement économique, l'aide, le contrôle des naissances pour éviter un affrontement programmé entre le Nord et le Sud. Voilà pourquoi la fermeté dans le traitement de l'immigration clandestine est la seule réponse possible pour assurer la paix et ne pas insulter l'avenir.
Le gouvernement, en choisissant la fermeté, n'a pas choisi la politique de la haine de l'Autre. Il a fait un grand pas pour relever l'un de nos défis majeurs, n'en déplaise aux bien-pensants aux mains pures, qui n'ont pas de mains, comme le soulignait Charles Péguy.