Le Ministère de l'Intérieur

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Lettre au Troisième Collectif (16 juillet 1998)

  
Madame, Messieurs,

Je vous confirme ci-après les conclusions de nos entretiens du 16 juillet.

I- Dispositions dont l'application incombe au ministère de l'Intérieur

II- Problèmes d'interprétation de la circulaire

  1. Le ministère prend acte de ce que le Troisième Collectif a soulevé devant la commission consultative, le 15 juillet 1998, les problèmes suivants d'interprétation de la circulaire :

    1. Exigence d'une période de séjour régulier (1.6)

      Cette exigence sera exprimée sous la forme qu'elle prend dans la circulaire du 24 juin : l'étranger sans charge de famille doit justifier qu'il a été "au moins pendant une période en situation régulière".

    2. Ressources issues d'une activité régulière

      a) La notion de régularité est prise en tous ses sens.
      b) Les ressources ainsi entendues sont établies par tous moyens.

    3. Obligation fiscales

      Le dépôt a posteriori des déclarations de revenus, quelle qu'en soit la date, vaut acquittement des obligations fiscales.

    4. Date d'arrivée en France, ancienneté et continuité de séjour

      La date effective de l'entrée en France peut être établie par tout moyen produit à l'appui du recours, et les dates indiquées sur les APS ou les récépissés ne font pas nécessairement foi.

      L'ancienneté du séjour est établie par tout moyen et aucune preuve ne peut être récusée a priori.

    5. Famille restées en tottalité ou en partie au pays (1.4 et 1.6)

      Ni pour la famille (1.4), ni pour les étrangers sans charge de famille en France (1.6), le fait que tout ou partie de la famille soit restée au pays ne peut faire obstacle à la régularisation.

    6. Enfants arrivés mineurs et devenus majeurs

      Les enfants arrivés mineurs et devenus majeurs depuis sont considérés non pas comme étrangers sans charge de famille (1.6), mais comme des membres d'une famille constituée de longue date en France (1.4.1). Leurs dossiers ne sont pas dissociés de ceux de leurs parents.

    7. Menace à l'ordre public

      La menace à l'ordre public ne peut pas être invoquée à propos de faits liés à l'irrégularité du séjour.

    8. Durée minimale de séjour

      Les durées minimales de séjour sont appliquées non pas de façon mécanique, mais en tenant cmpte des situations réelles et des problèmes humains des demandeurs.

    9. Enfants nés en France (1.4.2)

      La présence d'un enfant né en France est considérée à la date de la décision de régularisation, et non à la date de la publication de la circulaire.

    10. Conjoint d'étranger en situation régulière (1.2)

      Les conditions posées au § 1.2 de la circulaire (cinq ans de séjour ou participation effective à l'entretien des enfants) sont appliqués en tenant compte de l'article 8 de la CEDH.

    11. Scolarité de cinq ans au moins pour le regroupement famillial (1.5.1)

      Cette condition est appliquée en tenant compte de l'article 25, alinéas 1 et 10, de l'ordonnance du 2 ovembre 1945, qui interdit l'expulsion et la reconduite à la frontière des mineurs de moins de dix-huit ans.

    12. Couples concubins et mariés sans enfant

      Les couples concubins et mariés sans enfant sont considérés dans la catégorie 1.4.1 et non pas dans la cétégorie 1.6.

    13. Risque vital (1.0)

      La procédure de l'asile territorial peut être appliquée à tous les demandeurs qui établissent courir un risque vital en cas de retour dans leur pays d'origine.

  2. Le ministère, sans préjudice des avis donnés rapidement par la commission, s'engage dès à présent à examiner les recours avec les interprétations données aux points 2b, 4, 7, 11 et 13.

    Il appliquera le point 1 conformément à l'avis de la commission, dès que ce dernier lui sera parvenu.

    S'agissant des points 5 et 9, le ministère a donné son accord à la rédaction suivante :

    "5- Famille restée en totalité ou en partie au pays (1.4 et 1.6)

    Ni pour les familles (1.4), ni pour les étrangers sans charge de famille en France (1.6), le fait que tout ou partie de la famille soit restée au pays ne peut en soi faire obstacle à la régularisation."

    "9- Enfants nés en France (1.4.2)

    La présence d'un enfant né en France est prise en compte à la date limite du dépôt des demandes initiales (c'est-à-dire le 1er novembre 1997), et non à la date de la publication de la circulaire."

    Comme indiqué ci-dessus, il mettra en oeuvre rapidement, dès lors qu'il les aurait retenus, les avis de la commission, portant sur les autres points, dès lors que ces avis auront été rendus.

    Le ministère s'engage à demander l'avis de la Commission consultative sur la situation des étrangers qui font l'objet d'une interdiction du territoire français pour irrégularité du séjour, à titre de peine principale.

    Les dossiers du Troisième Collectif refusés par les préfectures seront réexaminés dans un esprit positif, dans le cadre des recours hiérarchiques ; les délais de recours ne leur seront pas opposables.

III- Le Troisième Collectif

  1. Il est donné acte au Troisième Collectif de la remise de la liste des étrangers dont il entend voir réexaminer la situation.

  2. Le Troisième Collectif remettra les dossiers correspondants au ministère (direction des libertés publiques et des affaires juridiques) dès que possible et au plus tard le 31 juillet prochain.

  3. Le Troisième Collectif fait connaître, par un communiqué remis au ministère ce jour, que ses membres en grève de la faim cessent leur mouvement dès aujourd'hui.

IV- Mise en oeuvre de l'accord

Une procédure de suivi du protocole, sous forme d'entretiens réguliers entre le Troisième Collectif et la direction des libertés publiques et des affaires juridiques, sera mise en oeuvre à compter du 20 juillet 1998.

Je vous prie d'agréer, Messieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.