DÉCLARATION DE PRINCIPE
par Madjiguène Cissé | [pajol] |
LE 18 mars prochain, nous célébrerons le 3ème anniversaire de notre lutte. Dans une lutte comme la nôtre, qui a vite occupé une place importante dans le mouvement social, comme dans toute lutte, des positions et des stratégies différentes ont pu apparaître à plusieurs reprises. Ces débats, malgré de très fortes tensions à certains moments ont néanmoins permis de prendre les décisions qui s'imposaient pour chaque étape et d'aller de l'avant.
Les contradictions qui sont apparues ont conduit à des clivages en notre sein, et de part et d'autre les concessions nécessaires n'ont pas été faites à temps pour les dépasser. Dans la dernière période, des propositions de se retrouver dans une réunion pour discuter dans le but de trouver des solutions faites par le collectif d'Ile-de France ont été sabotées par des « membres » du secrétariat national dans un communiqué invitant les collectifs à ne pas se présenter à la dite réunion.
La violence n'a jamais été absente de notre lutte, ne serait-ce-qu'en raison de toutes les forces qui se sont opposées à nous depuis le début. Mais la violence physique a trop fréquemment et systématiquement été exercée par Momar Diop, en particulier, et ce sur plusieurs sans-papiers ou soutiens. Il y a eu encore recours récemment sur ma personne et sur deux femmes soutiens de Saint-Bernard et du collectif d'Ile de France, le 17 janvier 1999, en pleine réunion de coordination nationale. Ses agressions verbales et ses menaces au cours de la même réunion à l'encontre d'autres sans-papiers n'ont évidemment pas permis d'arranger un climat déjà tendu. C'est inadmissible que quelqu'un qui prétend être un dirigeant de la lutte des sans-papiers se comporte de la sorte. Les sanctions à l'encontre de telles personnes ne doivent pas être que verbales. Nous ne pouvons accepter que le discrédit soit jeté sur notre lutte à son niveau le plus élevé.
C'est dans ce climat de tension volontairement instauré, et que l'on peut considérer comme une volonté d'empêcher tout dialogue qui a poussé les sans-papiers du collectif d'Ile de France à faire la réquisition du matériel du 22 janvier. L'idée était de récupérer le matériel qui leur avait été pris le 17 avril 1997, par des personnes se disant membres de la coordination nationale, à la permanence de la coordination nationale, au 22 rue Pajol.
Faisant le bilan de cette opération, les sans-papiers du collectif ont considéré qu'elle était malvenue dans la période, ainsi que d'ailleurs l'occupation du local de la CGT au 94, rue Jean-Pierre Timbaud, action mal pensée quant à ses conséquences sur l'avenir de notre mouvement. Réflexion faite, cette opération n'a servi qu'à installer un climat de méfiance entre nous et des soutiens qui, jusqu'à présent, nous ont apporté un soutien que nous avons su apprécier à chaque étape de notre lutte.
Mais au cours de cette action de réquisition, qui, à l'origine, avait, entre autres objectifs de susciter le débat tant voulu, (mais évité ou saboté par tous les moyens par ceux qui n'ont aucun intérêt à ce que les sans-papiers se retrouvent) , il s'est passé des événements graves le 22 janvier que je ne peux cautionner en tant que responsable de la lutte des sans-papiers depuis le début.
Aucune divergence ne saurait justifier de tels comportements qui ne servent qu'à discréditer notre mouvement. Ainsi, malgré les importantes divergences existant entre Aminata Diané et moi sur la conduite du mouvement des sans-papiers, je condamne avec fermeté l'agression verbale, sexiste et physique dont elle a été victime, comme j'ai toujours condamné de façon publique toute forme de violence d'où qu'elle puisse venir. Je ne pourrais en aucune façon tolérer qu'une femme soit insultée, battue et atteinte dans son intégrité.
Nous ne pouvons résoudre des contradictions d'ordre politique par la violence. Et il y a aujourd'hui en France, de nombreuses forces qui ont tout intérêt à nous voir nous entre-déchirer et qui ne reculeront devant rien pour nous conduire à ces comportements politiquement suicidaires, y compris à l'intérieur des collectifs.
Il est de la responsabilité de chaque personne, de chaque collectif de prendre les dispositions utiles pour que de tels agissements ne se reproduisent plus et que des sanctions soient prises à l'encontre de leurs auteurs.
C'est sur la base de cette clarification que pourra s'instaurer le débat et se retrouver l'unité.
Car seule cette unité peut nous faire atteindre notre objectif principal : la régularisation de tous les sans-papiers par une carte de 10 ans.
Madjiguène Cissé
Paris, le 21 février 1999