Portrait de Moussa Thiam
42 ans, mauritanien
[sans-papiers] |
MOUSSA était forgeron en Mauritanie. Il a du fuir son pays avec sa famille suite à la répression de 1989 qui avait pris pour cible la population négro-mauritanienne. Leur maison fut saccagée et leurs biens spoliés par des maures blancs qui détenaient des postes clés dans l'administration et dans l'armée mauritaniennes. Réfugié au Sénégal dans des conditions extrêmement péni-bles, Moussa décida de partir. Il avait entendu parler d'un pays démocratique qui se nommait la France... Après un pénible voyage par voie routière au cours duquel Moussa perdu ses papiers, il arriva en France en automne 1989. Il n'a plus aujourd'hui que des photocopies que sa famille au Sénégal lui a envoyées. En novembre 1990, Moussa prit son courage à deux mains et se rendit au commissariat du Havre pour déposer une demande d'asile. Ce fut là le début de tracasseries policières qui seraient caucasses si elles ne jouaient pas ainsi avec la vie d'un homme. En effet, les policiers ont tout simplement arrêté Moussa en l'accusant d'être un trafiquant de l'or ! Ils ont confisqué ses papiers ainsi que ses effets personnels et l'ont mis en détention préventive à la Maison d'arrêt du Havre. Il y restera...6 mois. Jugé en mai 1991 par le tribunal correctionnel, il sera condamné à 7 mois de prison (dont 6 déjà faits). Le 27 mai 1992, la sous-préfecture du Havre lui notifiait son arrêté de reconduite à la frontière, mais vers quelle frontière ? En fait, l'administration française a bien été incapable de prouver l'identité de Moussa. Les demandes de laissez-passer qu'elle adressa à l'Ambassade de Mauritanie comme à celui de Sénégal aboutissaient à la même réponse : ³ Ce monsieur n'est pas mauritanien (ou sénégalais) ². Les policiers ont donc été contraints de libérer Moussa en lui intimant l'ordre... de quitter le territoire français sous peine de nouvelles poursuites. De plus, Moussa n'a pu récupérer ses effets personnels, confisqués par les policiers lors de son arrestation. Il a donc engagé (avec le soutien financier d'un ami) un avocat pour l'aider dans cette démarche longue et compliquée. En attendant, Moussa sera de nouveau arrêté au foyer d'Elbeuf le 27 mai 1992 par des policiers qui semblaient avoir fait une descente à 5h du matin spécialement pour lui. Se jouait alors le même scénario : tentative de reconduite à la frontière soldée par un échec faute de preuve de nationalité; remise en liberté le soir même avec l'ordre de... quitter le territoire français le plus vite possible ! La boucle est bouclée ! Moussa survécut ainsi dans la clandestinité, grâce à la solidarité des amis jusqu'en juillet 1997, date à laquelle il déposa une demande de régularisation dans le cadre de la circulaire Chevènement. Pour couronner le tout, la sous-préfecture du Havre reculait systématiquement l'échéance à laquelle Moussa devait retirer son récépissé. La dernière échéance qu'elle lui a notifiée est le 30 avril 1998, date à laquelle la circulaire Chevènement prend fin ! Autrement dit, si la réponse est négative, Moussa n'aura plus ce cadre administratif sur lequel s'appuyait sa demande. Logique non ? Quant à un éventuel retour en Mauritanie, ce n'est pas envisage-able. En effet, Moussa est toujours sans nouvelles d'un de ses frères resté en Mauritanie... |
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