[zpajol]


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Date: Fri, 13 Dec 1996 18:27:21 +0200
From: iss@inrets.fr (Isabelle Saint-Saens)
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Subject: Communique GISTI-projet Debre

voila le communique dont je vous parlais hier
Mes commentaires : un peu oiseux, dans la mesure ou je souscris
totalement a ce qui est dit.

Le GISTI et d'autres associations (et individus) ont entrepris
de denoncer ces "dogmes" (fermeture des frontieres, maitrise
des flux, etc.) qui ne conduisent qu'a enteriner l'idee d'un partage
entre les "bons" immigres (i.e. ceux qui ont un droit legitime a
demeurer en France) et les "mauvais", ceux qui n'en ont pas.
Entre les familles (en denoncant les atteintes au regroupement
familial) et les celibataires ou ceux vivant en union libre.
Comme le disait Rocard "la France n'a pas vocation a accueillir
toute la misere du monde, mais elle doit en prendre sa part",
sous-entendu les bons, les reguliers, pas les autres ; et la droite,
extreme ou pas, et une bonne partie de la "gauche" et consorts
(pour ne citer qu'eux, Emmanuelli et SOS Racisme, ou les
"realistes" du PS), de s'engouffrer dans l'amalgame entre
clandestins et irreguliers, et, pourquoi pas, delinquants.

Si l'on veut reaffirmer le droit a la libre circulation des hommes,
la liberte de chacun de vivre ou il veut, comme il le veut
(et pas seulement la libre circulation des marchandises), ce sont
ces dogmes qu'il faut remettre en question

Isabelle

Isabelle Saint-Saens -+- iss@inrets.fr -+- Inrets, France
j'ai demande au GISTI l'analyse detaillee du projet de loi,
car, comme le disait quelqu'un sur la liste (Marc Chemillier ou
Martin Zerner) il vaut meiux avoir un code ou un juriste sous
la main pour le lire ...


GISTI
Groupe d'information et de soutien des immigres
3, villa Marces 75011 Paris
tel 01.43.14.84.84 - fax 01.43.14.60.69

Communique
PROJET DE LOI PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES A L'IMMIGRATION


Contre le droit des gens, les libertes et l'integration

Paris, le 8 novembre 1996

Le projet de loi modifiant l'ordonnance du 2 novembre 1945, que le
ministre de l'interieur, Jean-Louis Debre, a fait adopter par le
conseil des ministres du 6 novembre 1996, est presente par les
pouvoirs publics comme une tentative de regler "des difficultes
reelles de mise en oeuvre" de la loi Pasqua. A cet aspect,
suppose purement technique, s'ajoutent les lecons tirees de
"certaines affaires (qui ont) plus specialement defraye la chronique".
Que le gouvernement juge innommable la lutte des sans-papiers de
Saint Ambroise-Saint Bernard et de leurs homologues de banlieue et
de province donne une petite idee de son desir reel d'agir sur les
causes de cette revolte. Il n'empeche que cette evocation genee de
l'actualite lui permet de presenter son projet comme une innovation
equilibree, caracterisee par un savant dosage entre fermete et
liberalites, et susceptible de repondre aux principales revendications
de bon nombre des sans papiers. Une partie de la presse a un peu
rapidement fait sienne cette appreciation.

En realite, le principe de la loi Debre repose sur un veritable parti
pris en faveur de la precarite des etrangers. Il n'hesite pas a porter
atteinte aux libertes des Francais et des etrangers en situation
reguliere. Il s'efforce de rendre plus difficile le rôle du juge
judiciaire en matiere d'eloignement. Enfin, malgre des evidences
statistiques de notoriete publique qui prouvent le contraire,
il entretient deliberement l'assimilation entre travail illegal
et presence en France d'etrangers en situation irreguliere.


Option en faveur de la precarite

S'il est vrai que le projet de loi prevoit la regularisation de
certains jeunes entres en France hors de la procedure du regroupement
familial, d'etrangers en situation irreguliere depuis plus de
quinze ans, de conjoints de Francais et de parents etrangers
d'enfants francais, il prend explicitement le parti de placer
les uns et les autres dans la precarite. La solution trouvee a
l'impasse juridique creee par les lois Pasqua, en particulier a
la creation des categories d'etrangers ni eloignables ni
regularisables (sauf derogation, toujours possible), repose en
effet sur la delivrance de titres de sejour provisoire, dont
le renouvellement est moins que jamais assure.

De toute evidence, le gouvernement n'a plus le moindre souci de
l'insertion. C'est d'ailleurs, pour la premiere fois depuis bien
longtemps, une notion totalement absente - y compris a titre de
clause de style - de l'expose des motifs. Il est vrai que
Jean-Louis Debre s'est rattrape depuis lors (Le Figaro,
7 novembre 1996) en substituant massivement l'"assimilation"
a l'integration.


Nouvelles atteintes aux libertes de tous

Une fois encore, la lutte contre l'immigration clandestine se
retourne contre les libertes individuelles. Elles avaient deja
souffert de rudes coups portes par Charles Pasqua dans le domaine
des contrôles d'identite et des mariages. Voila que son successeur
permet aux maires de refuser de delivrer des certificats
d'hebergement aux Francais et aux etrangers en situation reguliere
qui n'auraient pas certifie que leur invite etranger est reparti
aux termes de la duree de validite de son visa. A la faveur de
cette innovation, qui invite a la delation et peut en legitimer
d'autres, les premiers magistrats de nos cites ne pourront pas
identifier les "fautifs" pour les punir sans les avoir, d'une
maniere ou d'une autre, inscrits dans un fichier. A partir de la,
n'est-il pas imaginable que de nombreuses communes entreprennent
de tenir un registre ou un fichier de tous les demandeurs de
certificats d'hebergement ?

Que dire encore de ce curieux privilege qui, si le projet etait
adopte, confererait un caractere suspensif au seul appel forme
par le ministere public contre la remise en liberte, decidee par
le juge de premiere instance, d'un etranger place en retention ?
Ce qui reviendrait a prolonger la privation de liberte d'un
individu qui viendrait pourtant d'etre libere par la justice.

La liberte d'aller et de venir ne sort pas non plus renforcee
du projet de loi, puisqu'il prevoit que les "vehicules circulant
sur la voie publique, a l'exclusion des voitures particulieres"
pourront desormais subir des "visites sommaires (...) en vue de
rechercher et constater les infractions relatives a l'entree et
au sejour des etrangers en France" dans une zone de vingt kilometres
a partir de la frontiere avec les États signataires de la Convention
de Schengen (actuellement tous les pays frontaliers, sauf la Suisse).
Meme si ces nouveaux controles impliquent l'accord du procureur de la
Republique, ils etendent les pouvoirs de la police sur les citoyens.

Il en est de meme de la possibilite pour la police d'entrer bientôt
dans des lieux professionnels pour controler l'identite de ceux qui
y travaillent, de facon a verifier s'il ne s'agit pas de
travail illegal.


Amalgame entre travail illegal et etrangers

Meme si le projet de loi vise en principe les seuls employeurs, on
peut craindre des derapages. Mais il y a pire. Le texte permettant
a la police de penetrer dans des ateliers figurait initialement, sous
la forme d'un article 3, dans le projet de loi prepare par le ministre
du travail et des affaires sociales, Jacques Barrot. Il en a ete
retire, le 16 octobre, par le conseil des ministres (et non par le
Conseil d'État, comme une rumeur tenace tend a l'etablir) qui a
prefere l'inserer dans le projet du ministre de l'interieur
"relatif a l'immigration". Comme si le gouvernement souhaitait
entretenir l'idee qu'il y a un lien de cause a effet entre travail
illegal et presence des etrangers en France. Il sait pourtant
qu'ils y participent a hauteur de 10%, et qu'on releve la presence
d'etrangers en situation irreguliere dans 6% seulement des
proces verbaux de police relatifs a ce type d'affaires.

Faut-il que le gouvernement veuille marginaliser les etrangers
et les exposer a la vindicte pour avoir en plus rebaptise le
projet du ministre du travail ? Avant son adoption, il s'intitulait
"Projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre
le travail illegal". Apres cette adoption, il est devenu
"Projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre le
travail clandestin". Tout un programme quand on sait la
connotation de la clandestinite par les temps qui courent.


Minimisation du role du juge judiciaire dans la procedure
d'eloignement

"Le bras seculier" de la volonte du ministre de l'interieur etant
"l'execution des reconduites a la frontiere" (Le Figaro,
7 novembre 1996), son projet n'hesite pas a proposer que le
controle du juge judiciaire sur le maintien en retention des
etrangers en voie d'eloignement s'exerce 48 heures apres le
debut de la retention au lieu de 24 heures actuellement.
Il sera ainsi possible de renvoyer dans leurs pays des etrangers
qui sont aujourd'hui remis en liberte, surtout depuis que
- et peut-etre bien parce que - la Cour de Cassation a autorise
le juge a examiner la legalite des conditions d'interpellation.

Analyse detaillee du projet de loi disponible sur demande


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