CIRCULAIRE DU 11 OCTOBRE 1999

Argumentaire sur la circulaire du 11 octobre 1999

par Patrick QUINQUETON (conseiller sur les problèmes d'immigration de Chevènement) [bok.net/pajol]





ARGUMENTAIRE
CIRCULAIRE DU MINISTRE DE L'INTERIEUR DU 11 OCTOBRE 1999 CONCERNANT L'ELOIGNEMENT DES ETRANGERS EN SITUATION IRREGULIERE


  1. Il s'agit d'une circulaire qui se contente de rappeler quelque chose qui, aujourd'hui, choque beaucoup de « bien pensants » : il faut appliquer la loi. Il faut avoir l'esprit bizarrement orienté pour reprocher au ministre de l'intérieur de faire un tel rappel aux préfets de la République.

  2. L'argumentation en est clair dans la lettre du ministre aux préfets : « La politique en matière d'immigration est désormais équilibrée. La loi de 1998 a ouvert de nouveaux droits aux étrangers ; elle facilite le séjour de personnes qui ont, à divers titres, des liens avec notre pays. Elle a pour corollaire le refus d'installation de ceux qui, venus irrégulièrement, ne peuvent revendiquer de tels liens. »

  3. Le ministre constate deux choses : alors même que toutes les décisions ont été prises dans l'opération de régularisation et que seule une minorité a fait l'objet de refus définitif (60000 et même 50000 si l'on tient compte de ceux qui ont été régularisés ensuite par application de la loi ), des arrêtés de reconduite à la frontière n'ont pas été pris dans la moitié des cas ; en même temps, seul 20% des personnes ayant fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière sont effectivement reconduites aujourd'hui. La loi n'est donc pas appliquée.

  4. Les bonnes âmes s'émeuvent de la reconduite à la frontière. Mais il faut tout de même rappeler que cette procédure est précisément prévue pour éviter aux irréguliers une condamnation pénale. La sanction du séjour irrégulier est la reconduite de l'intéressé dans e pays dont il a la nationalité, et où habite sa famille, aux frais de la République française. Il est à noter que la grande majorité des étrangers reconduits le sont sans escorte : ils montent dans un avion ou en bateau à destination de leur pays.

  5. Bien entendu, s'il y a le moindre risque en cas de retour ou si l'intéressé peut se prévaloir de sa situation familiale, il n'est pas reconduit. L'éloignement n'intervient en fait qu'après contrôle par plusieurs juges (tribunal administratif pour la validité de l'arrêté préfectoral, tribunal de grande instance en cas de prolongation de la rétention administrative).

  6. Refuser la reconduite à la frontière des irréguliers signifierait cautionner, apporter un appui aux filières de travail clandestin. Si l'intéressé ne peut séjourner en France, ne vaut-il pas mieux qu'il soit reconduit dans son pays, plutôt qu'être « l'armée de réserve du capital », au risque de condamnation pénales ultérieures ? C'est, en tout cas, notre choix.

  7. Cette circulaire aux préfets, purement technique, indique comment mieux appliquer la loi, dans un domaine particulier, qui ne résume pas toute la loi. Sur la vingtaine de circulaires signées par le ministre de l'intérieur depuis 18 mois qui concernent le droit des étrangers, seules quatre concernent la maîtrise des flux migratoires ou l'éloignement. Toutes les autres concernent les situations où un titre de séjour doit être délivré. Dans le même temps, un effort tout particulier est fait pour améliorer l'accueil en préfecture des étrangers sollicitant un titre de séjour, ainsi que pour alléger les procédures. Une journée de travail sur ces sujets réunira d'ici la fin de l'année, en présence du ministre, les cadres des services des étrangers des préfectures. Ainsi la politique du Gouvernement est bien une politique ouverte, dans les limites de la capacité d'intégration de notre pays.